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Pourquoi faire la différence entre sécheresse et vagues de chaleur est important pour ajuster les stratégies d'irrigation ?
Thibaut Scholasch  1@  
1 : Fruition Sciences  (360viti)  -  Website
Fruition Sciences SAS [Montpellier]

Communément utilisé pour caractériser la tension de la colonne d'eau qui circule dans la plante, du sol vers l'air où l'eau se vaporise, l'usage du potentiel foliaire a été appliqué au pilotage de l'irrigation. Or il n'est pas le plus adapté pour optimiser l'irrigation, parce qu'il combine dans sa mesure les effets de la quantité d'eau présente dans le sol et dans l'air. Ainsi, même en cas de forte disponibilité en eau du sol, le potentiel foliaire peut donner un “signal” de besoin d'irrigation si l'air est chaud et sec, déclenchant des irrigations non justifiées. Conçus spécifiquement pour répondre aux besoins d'irrigation, les capteurs de flux de sève mesurent un débit d'eau dans la plante (sève) qui n'est pas réduit par une vague de chaleur lorsque la disponibilité en eau du sol est forte. Ils permettent donc de déclencher des irrigations seulement quand la sécheresse du sol le justifie.

Depuis 10 ans les capteurs de flux de sève, développés avec Fruition Sciences et installés à travers le monde particulièrement en Californie (climat aride), fournissent un historique important. Ces données permettent de préfigurer des scénarios dans un contexte de réchauffement climatique. Ainsi nous savons décrypter très précisément - et c'est mon domaine d'expertise en tant que chercheur- le comportement hydrique de la vigne.

En tension entre sol et air, la circulation de l'eau dans la vigne subit deux contraintes. En cas de trop forte sécheresse de l'air ou du sol, les feuilles peuvent “disjoncter” du reste de la plante (cavitation). Ce phénomène, irréversible, rend les mesures du potentiel foliaire inadaptées pour le pilotage de l'irrigation puisque la feuille traduit désormais une information partiellement connectée au reste de la plante.

En revanche les capteurs de flux de sève, connectés à la plante entière et non à la feuille, restituent une information complète pour décrire le statut hydrique de la plante et ajuster les méthodes d'irrigation. Nous avons démontré, avec d'autres chercheurs (*), que les connaissances récentes permettent de revisiter les techniques d'irrigation : 

  • Adopter un modèle d'irrigation qui tienne compte de l'état de stress hydrique sans biais d'interprétation : « tant que la vigne transpire tout va bien ! ». De nouveaux modèles du fonctionnement hydrique, ancrés dans la mesure directe de la transpiration ont ainsi été développés. 
  • Envisager plus largement le recours à la brumisation lorsque le niveau d'eau disponible dans le sol est suffisant, afin de prévenir le risque de cavitation induit par les vagues de chaleur (demande évaporative très forte). 
  • Un début d'irrigation plus tardif et une modification des cycles irrigation (plus de volume moins souvent, une révolution face aux habitudes traditionnelles de fréquences élevées avec faible volume) permettent d'entraîner la plante à mieux lutter contre le stress hydrique. Quatre bénéfices majeurs : une vigne plus résistante aux vagues de chaleur, un meilleur rendement, moins de temps humain à gérer les irrigations et des economies d'eau (jusqu'a 60%).

A contre courant des habitudes, ces découvertes, ancrées sur des données factuelles et une solide expérience, appellent donc l'industrie viticole à modifier ses réflexes.



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